Ah ! L’INJONCTION à partir en vacances, avec la confusion (absolument délibérée) entre “partir en vacances” et “congés payés” : car comprenez-vous, l’important n’est pas de souffler et d’aller voir ailleurs, mais de CONSOMMER ! d’où cette injonction à partir dans un lieu – si possible lointain – où il faudra tout acheter… VIVE LE TOURISME (et sa part de PIB) ! après tout, il faut un retour sur investissement des programmes d’accompagnement ! “pognon de dingue”, vous vous souvenez ?
D’ailleurs, faisons un test : fermez les yeux. Si je vous sussurre à l’oreille le mot “vacances”, quelle est la première image qui vous vient à l’esprit ?
Pour beaucoup d’entre vous, ça sera un lieu ensoleillé avec la mer à proximité, un parasol, un cocktail de fruits bien frais et les doigts de pieds en éventail.
Maintenant, regardez le résultat d’une recherche Google :
Étonnant, non ?
Alors ? Est-ce Google qui adapte ses résultats à ce que vous souhaitez en votre for intérieur ? ou est-ce que Google SAIT ce que vous désirez parce que ce désir a été implanté dans votre cerveau à grands renforts de publicités ?
Mais surtout, le fait que 40 % de la population ne part pas en vacances N’EST PAS LE PROBLÈME, c’est juste un symptôme.
Déjà, il y a sans doute, parmi ces 40 %, des gens qui N’ONT PAS ENVIE de partir. Non, qu’ils aient peur de partir, parce que changer d’environnement, modifier ses routines, ça peut être intimidant. Mais juste des gens qui se sentent bien chez eux et n’éprouvent aucun besoin d’aller voir ailleurs s’ils y sont. Après tout, il y a ne serait-ce qu’un siècle, la part de la population qui “partait en vacances” était infinitésimale, cette activité étant réservée à l’aristocratie et à la haute bourgeoisie. Les personnes de “condition inférieure” ne partaient pas. Étaient-elles plus malheureuses pour autant ? Certaines oui, d’autres non. “Partir en vacances” n’était en rien un critère de bonheur, juste un marqueur de richesse.
Et aujourd’hui, on peut très bien “changer d’air” sans partir, simplement en ayant des activités différentes. Combien, parmi la population urbaine, méconnaissent la ville où ils habitent ? Qui a visité tous les musées, tous les bâtiments du patrimoine, été voir toutes les expos, qui est allé aux concerts et aux divers événements programmés intramuros ? Encore faudrait-il que l’information parvienne jusque dans les quartiers concernés et que ceux à qui ça profiterait le plus s’y sentent accueillis bienveillament.
Ceci étant, il est absolument évident qu’aujourd’hui, partir et “changer d’air” est aussi on ne peut plus légitime, a fortiori lorsqu’on (sur)vit dans un appart’ pourri, au sein d’une cité pourrie, dans une banlieue pourrie, en marge d’une ville pourrie, le tout avec un niveau de vie pourri.
Et c’est justement là que réside le véritable problème : la pauvreté qui écrase les populations et ne leur permet pas de vivre dignement ! et c’est AU QUOTIDIEN que ça se passe, pas uniquement une semaine en été, durant laquelle on ne pourra pas consommer de la plage de sable fin et des glaces trop sucrées en cornet !
“Partir”, offrir cette opportunité, aussi bénéfique cela puisse être pour ceux qui ont la chance d’accéder aux différents programmes d’aides, n’est en réalité que l’arbrisseau rachitique qui cache la forêt des injustices sociales, et le cache-misère d’une politique sociale et d’une politique de la ville, toutes deux totalement à la ramasse, aux budgets aussi misérables que ceux qu’elles doivent aider, et souvent détournés sur des projets à forte valeur ajoutée politicienne, mais sans réel effet sur le quotidien.